• Jour de fête, forcément!


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  • Et vous, ça va?

     

    "Bonjour! Comment ça va?"

    Phrase anodine, automatique, délivrée en hâte  et sans âme du bout des lèvres à toute personne rencontrée le matin. A la maison, à l'école, au travail, dans la rue, à la caisse... Enfin, pas toujours. On demande rarement à une hôtesse de caisse comment elle va, ou à une secrétaire de bureau. Et puis, dans la rue, ce serait presque bizarre de demander à l'inconnu que l'on croise comment il va. On nous regarderait de travers, des fois qu'on aurait pété un cable au passage. Dans notre société formalisée, on ne s'enquiert jamais de ce que l'autre représente vraiment. On se cantonne à cette superficialité de bon aloi, et on attend toujours la même réponse.

    "Oui, ça va!"

    Et là, tout le monde est content. Celui qui a posé la question se rengorge, il a fait sa part du boulot, il est passé pour un être d'une exquise politesse, à la limite de l'empathie. Celui qui a répondu aussi, même s'il a menti. On peut passer à autre chose, on a franchi le cap des mondanités. On ravale ce "Non, ça ne va pas, en fait!" qui brûle la langue et qui ne récolterait qu'un soupir excédé, même imperceptible, un battement de paupières en trop sur un visage lisse. Trop lisse.

    "Non, ça ne va pas du tout".

    On en crève, de ne pas le dire, et ça enfle à l'intérieur, ça gonfle tellement qu'on aurait envie de voir tout ça péter à la gueule du poseur de question. Une explosion nucléaire, même, le genre qui dévaste tout, qui arrache la bienséance à son socle immobile, la projette en l'air bien haut pour qu'elle ait une vue d'ensemble du problème. Et qui la fait retomber et s'écraser au sol en éclatant en plein de petits morceaux. Comme du verre. Va marcher dessus, après. Repose ta question, que je te raconte comment je vais. Ce sera douloureux au début, juste un peu, mais tu verras, on s'habitue. J'en sais quelque chose.

    "Et toi, comment vas-tu?"

     

    Photo: Faces of madness. The day Petshop died. Efelo Dream factory


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  • Petites lettres et grands espoirs

     

    Alors que je viens d'envoyer un manu-tapuscrit à quelques éditeurs, je m'interroge sur l'espèce de pelote d'émotions que cela génère en moi.

    Au commencement était le Verbe. Ou le nom commun, ou l'adjectif, je ne sais plus trop. A moins que ce n'ait été un pronom personnel, oui, je crois bien que c'était le cas. Même que la première phrase était "Il était une fois". Une histoire de fée un peu bizarre. Un conte à rallonge qui m'a tenu entre ses griffes pendant de longs mois, durant lesquels nous nous sommes jaugés, appréciés, détestés, ignorés, aimés. Il y a eu des pauses plus ou moins longues entre chaque dépose de mots. Et un changement radical de pensée lorsque mes mains m'ont lâchée et que j'ai investi dans un logiciel de reconnaissance vocale pour terminer proprement le texte.

    D'ailleurs, c'est bizarre, ça. On n'écrit pas pareil quand on parle. C'est d'une évidence à s'en faire tomber les bras, mais de l'avoir expérimenté m'en a fait prendre conscience. Ecrire en parlant, c'est prendre le risque de s'écouter, trop sans doute, et de trahir l'esprit de l'histoire. Du coup, quand j'ai pu récupérer une fonction correcte de mes quelques doigts tapeurs, j'ai eu un peu de pain sur ma planche pour remettre de la fluidité dans tout ça.

    Puis il y a eu les finitions, les relectures sans fin, le lustrage de la bête et la chasse aux coquilles. Et malgré ça, on laisse passer des trucs comme "Abracacabra" après l'avoir visionné au moins dix millions de fois... J'ai passé le bébé à des amis, des amis d'amis, la famille, j'ai réparé ce qui devait l'être et modifié quelques incohérences. J'ai simplifié ce qui devait l'être sans perdre de vue la ligne que je m'étais tracée.

    Et un jour, je me suis retrouvée avec un pavé devant moi, avec une mise en page soignée, la raie au milieu et tout ça. Et là, rien. J'ai laissé mariner le bébé dans son jus. Il ne restait pourtant qu'une étape: mettre sous enveloppe et que vogue la galère. Mais non. Il s'est passé un jour, une semaine, un mois. La poussière a commencé à recouvrir le papier. J'ai dit à tout le monde que j'y songeais, que ça allait se faire, mais il y avait quelque chose qui retenait le geste final, une sorte de peur viscérale. Celle du rejet de l'autre. Il m'a fallu encore un peu de temps pour oser couper le cordon qui me rattachait aux mots que j'avais mis au monde, pour me dire que ça y était, ils étaient grands et ils devaient vivre leur vie ailleurs, d'une façon ou d'une autre. Continuer à exister sur  d'autres supports ou terminer au pilon. Me dire que quelque soit le sort qui leur serait réservé, mon esprit serait de nouveau libre pour tenter une nouvelle aventure avec d'autres héros, d'autres sujets, d'autres espaces.

    J'ai appuyé sur le bouton rouge la semaine dernière. Je n'ai plus qu'à ne rien attendre pendant 3 mois, c'est le délai standard. En tout cas, elle était vachement chouette, mon histoire, je me suis amusée comme une folle à l'écrire, et ça, personne ne me l'enlèvera!


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  • L'art des choix

     

    Ce qui est bien, avec les mots, c'est qu'en les déclamant à haute voix, on obtient une toute autre image mentale que celle que la lecture impose. Alors oui, bien sûr, aujourd'hui est le D Day, le grand jour pour nos amis américains qui vont devoir faire un choix éclairé, bla bla bla et bla bla bla.

    La politique, ce n'est pas trop ma tasse de thé. D'ailleurs, en parlant de ce breuvage, on va subrepticement se rapprocher d'un domaine qui a ma faveur, bien que ce soit parfois à mon corps défendant: la gourmandise.

    Présentez... Armes! Chocolat. Beurre. Sucre. Châtaignes. Cacao. Oeufs. Poudre d'amandes. Non, n'en jetez plus! Une couche de mélange oeufs, sucre, beurre, châtaignes; une couche de chocolat, poudre d'amandes, beurre; et on recommence. Finition glaçage au chocolat. Le voilà, mon ardéchois. Il passe bien, trop même. Il se fait envahissant, le bougre, un peu comme l'espèce de matière expansée dans "Tintin et le Lac aux Requins". Je mute en une masse informe, je déborde, j'occupe l'espace. En attendant, c'est normal, je suis d'une nature généreuse... Tant pis. Les scrupules seront pour un autre jour. Pour demain?

    Je n'accepterai de remords que s'ils sont armés d'une fine aiguille, histoire de piquer dans le tas pour le faire dégonfler un peu. Pshittttt! Comme ça, je pourrai recommencer, juste un petit bout, un seul, promis! Celui où la carapace de chocolat est la plus épaisse. C'est un choix mathématique:  elle offrira plus de résistance à mes crocs acérés, et le carnage durera plus longtemps...

    Alors, Obama ou Romney? Chocolat ou châtaignes? Plaisir ou abstinence? Pour vous, je ne sais pas, mais moi, je me refais encore une tranche...


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  • Rebellion

     

    Tap tap tap

    Quel est ce bruit qui frappe à ma tempe ?

    Je ne vois rien, je ne sens rien

    Que cet incessant martèlement assassin

     

    Noir ombre doute

    Mes yeux sont scellés collés englués

    Le rouleau de l’annonceur m’a bien scotchée

    Je suis aveuglée niée mais j’entends tout

     

    Lime ciseau hache

    A tâtons mes doigts se referment

    S’approchent de mon regard absent

    Et arrachent coupent tranchent le voile

     

    Lumière cri horreur

    Le monde à mes pieds se convulse

    Se tord meurt se révulse

    Ils ont tout détruit je n’ai rien vu

     

    Au secours je suis là aidez-moi 

    Je me noie suffoque meurs

    Où est ta main ton cœur mon âme

    Je suis perdue sur une route sans passage

     

    Non  non  non !

    Je sens la pelleteuse se refermer sur moi

    M’arracher des entrailles de la Terre

    Exhumant mes racines oubliées

     

    Faiblesse repli issue

    Je sens ma chitine se durcir

    Mon regard s’aguerrir

    L’horizon s’éclaircir.

     

    Tap tap tap...

    Le bruit sentinelle a cessé

    D’un sursaut rageur enfin je fends ma carapace

    Je surgis, libérée, et rejoins les insoumis.

     

    Photo: le gardien de la Forêt, Efelo Dream factory


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